L’origine de cet argent est en effet assez singulière.
Le 30 janvier 1833, au cours d’une soirée de gala aux Tuileries, le Comte d’Argout alors Ministre de l’Intérieur, passant près du Général Bugeaud, lui dit qu’il allait prochainement avoir besoin de lui.
En rentrant chez lui à 5 heures du matin, le Général Bugeaud trouva un ordre de mission lui enjoignant de se rendre immédiatement à la Forteresse de Blaye en Gironde où était retenue prisonnière la Duchesse du Berry.
Celle-ci avait été arrêtée par hasard lors de sa folle équipée entreprise contre « l’Usurpateur », le Roi Louis-Philippe, dans l’ouest de la France.
Il était demandé au Général Bugeaud d’assurer la garde de cette prisonnière de marque.
Ce dernier, arrivé à Blaye le 3 février, demanda à être reçu par sa prisonnière qui refusa de recevoir ce Général qui était à la solde de « l’Usurpateur ».
Bugeaud lui fit savoir qu’elle ne pourrait pas sortir de ses appartements tant qu’elle persisterait dans son refus. Elle finit alors par céder.
Quelques semaines plus tard, un évènement insolite devait modifier les rapports entre la prisonnière et son geôlier.
En effet, dans l’entourage de la Duchesse, on constata que ses formes s’arrondissaient, à tel point que la grossesse devint bientôt une évidence.
Le Général se rendit alors à Paris pour rendre compte de cet état de fait à son Ministre.
Ce dernier, ravi d’apprendre qu’ainsi la prisonnière serait déshonorée, voulut exploiter la nouvelle, mais Bugeaud s’y opposa brutalement, convainquant le Ministre qui s’inclina.
Le moment de l’accouchement arriva et une caricature montre Bugeaud en accoucheur avec un tablier de sage-femme.
Quelques semaines plus tard, le Général accompagna la Duchesse en Italie où elle alla rejoindre le père de l’enfant, le comte Lucchesi-Palli.
Bugeaud en rendit compte au Ministre qui lui dit : « Au fond, vous avez eu raison de vous conduire en galant homme. Aussi, je veux vous donner une gratification. »
Bugeaud répliqua : « Vous m’avez fait faire un sale boulot, vous pouvez la garder ! »
Par la suite il changea d’avis car Conseiller Municipal d’Excideuil, il sut que la population souhaitait bénéficier de l’eau courante.
Il réclama alors au Ministre son cadeau pour le profit de la ville. Sur les 20 000 francs donnés, 15 000 furent offerts à Excideuil et 5 000 à Lanouaille, le tout devant être utilisé à des adductions d’eau.
Chacune de ces cités eût donc sa fontaine.
La fontaine d’Excideuil fut installée dès 1834 sur la place Bugeaud, face à l’Eglise, en plein cœur du Bourg. Elle porte le nom de celui qui en fut l’instigateur, le Maréchal Bugeaud.
Constituée d’un ample bassin circulaire de pierre calcaire recouvert de plaques de fontes sur lesquelles sont fixés des porte-seaux.
Elle est surmontée d’une série de vasques de fonte aux motifs aquatiques, délicatement ciselés par le sculpteur Moreno, également réalisateur de la façade du Palais de Justice de Périgueux.
Au fil des années, un dépôt de calcaire avait recouvert les pièces de fonte à tel point que la fontaine paraissait toute de pierre et que les excideuillais avaient oublié son beau décor.
En 1997, une restauration eut lieu, offrant de nouveau cet ouvrage à la vue dans toute sa splendeur.
Entièrement nettoyée, pour la première fois depuis son installation, la fontaine a été complétée.
Les têtes de cygnes, dont trois avaient complètement disparu, ont été restituées d’après un vestige de la quatrième.
Réalisées à la Fonderie Lacoste à Excideuil, elles viennent parachever un ensemble de très grande qualité auxquels les habitants de la ville sont très attachés.
La fontaine est régulièrement nettoyée et repeinte afin de lui conserver sa beauté.